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La Société populaire à Franconville  sous « la Terreur » 1793-1795Btn retour
 
Par Allain Prigent

 

 

Cachet Société PopulaireÁ Franconville, comme partout ailleurs en France, les habitants et la municipalité subirent les effets de la terreur. Durant cette période les Sociétés Populaires étaient un moyen pour le gouvernement révolutionnaire de contrôler les habitants et les municipalités dans leur fonctionnement et les politiques menées.

La terreur est le terme employé pour désigner une période de la révolution française entre 1793 et 1794. Elle est caractérisée par la mise en place d’un gouvernement révolutionnaire, centré sur le comité de salut public et le comité de sûreté générale. Ce gouvernement est issu de la Convention nationale et la suspension de la constitution de l’an I.
Le 13 juillet 1793, le Comité de Salut Public de la Convention Nationale avait arrêté que les ministres de la guerre et de l’intérieur prendraient : «
les mesures les plus promptes pour faire arrêter, au deuxième ou troisième relais de poste, tous les courriers qui partent de Paris et ceux qui y arrivent et faire vérifier et inventorier le nombre et la qualité des paquets ou lettres dont ils sont porteurs et arrêter toutes celles qui ne seraient pas énoncées dans leurs passeports».

Franconville, à quatre lieues de Paris, située sur la grande route de Paris à Rouen par Pontoise, était un relais de poste, qui tombait sous le coup de cet arrêté du Comité de Salut Public. En conséquence, le ministre de la Guerre avait, le 20 juillet, nommé un commissaire chargé de se rendre à Franconville, afin de prendre toutes les précautions de sûreté générale indiquées par le Comité de Salut Public. Ce commissaire, nommé Louis Prière, arriva le soir même à Franconville et donna aussitôt ses ordres. Après huit jours de fonction, il fut dénoncé par la municipalité, avec pièces à l’appui, comme déserteur d'un bataillon de volontaires de la section du Luxembourg. Suite à une séance houleuse, pour sa défense il accusait la municipalité de manquer de civisme et d’être un repaire d’aristocrates. Il est mis en arrestation et début août reconnait les accusations portées contre lui. Le 12 août il prévenait le maire qu’il n’avait plus de mission et serait remplacé par un autre commissaire.

Les Présidents :

Ils n’étaient élus que pour une courte période :
Le 13 août, arriva le citoyen Jean Michel Dufour, nommé commissaire du pouvoir exécutif. Un rapport du maire nous éclaire sur le personnage «
il s’est porté accusateur du maire de la commune. Habile dans l’art de séduire et corrompre, il a formé une société dite populaire avec des individus sans propriété et la plus grande partie d’étrangers. Il associe cette société à celles des Cordeliers et des Jacobins. Ce ramassis d’individus, forma la Société Populaire de Franconville constituée le 18 août 1793».
Le 30 août 1793, Paul Regnard comme président et le 8 septembre, il devient simple membre (Est-ce le Regnard propriétaire de la mare au Regnard, déformée plus tard en mare au renard ?).
Le 6 septembre 1793, Parisot.
Du 25 octobre au 9 novembre, Jacques Genot tailleur.
Du 15 novembre au 12 décembre, Antoine Louvroy, compagnon maçon et indigent.
Pierre Nicolas Candas nommé le 18 décembre, domina et dirigea cette société associé à un membre Jean François Gillet. Ils sont à l’origine des troubles du 28 juillet, appelant les citoyens à commettre meurtres et assassinats, provocation aux meurtres et attroupements. Villeterque nommé le 8 juin 1794, homme de lettres, né à Ligny en Barrois en 1759, était étranger au pays et installé à Franconville au mois d’août 1793, chez Cadet de Vaux. Il était connu pour prononcer des discours, lors des fêtes de l’Être Suprême, «aussi pathétiques qu’énergétiques sur l’amour de la patrie et la reconnaissance» .
Plusieurs secrétaires se sont succédés, nous retiendrons le nom de Pierre Leplanquais, ancien vicaire de Franconville, élu curé à la place du curé Portefaix le 11 avril 1793. Il avait des idées avancées, avait abandonné ses lettres de prêtrise et s’était affilié à la société populaire pour obtenir un certificat de civisme.

 

L’activité économique et sociale

Pétition pour la prison

 

Prison 2La première assemblée constitutive de la société populaire eut lieu dans l’église paroissiale. À partir du 9 novembre les séances se firent dans une salle de la maison de Monsieur de la Crosnière (aujourd’hui maison Suger).
La première préoccupation de la Société Populaire fut de s’intégrer dans les affaires municipales en demandant la communication de toutes les pièces officielles que recevrait la municipalité et des arrêtés du Conseil général.
Le problème de cette époque était la question des subsistances. Dans la commune, il n'y avait aucune grande exploitation. Les maigres récoltes des petits cultivateurs étaient insuffisantes pour nourrir les habitants. Il était nécessaire de se procurer des grains ou des farines dans les marchés de Pontoise ou de Gonesse. La Société Populaire intervenait lorsque des commerçants refusaient de vendre certaines denrées suivant le barème fixé par le Directoire du district de Pontoise. Jusque-là, la Société Populaire n’avait fait que de remettre des pétitions. Elle prétendit bientôt donner des ordres.
Le 12 décembre 1793, elle exigea une nouvelle prison. L'existante était trop petite et insalubre et servait de dépôt et de maison d'arrêt. Elle était située au rez-de-chaussée de la
tour de l'ancien château seigneurial, devenu propriété nationale, confisquée à Anne-Léon, duc de Beaufort-Montmorency .

 

L’activité politique

Cachet Franconville la LibreC’est surtout dans le domaine politique que se manifesta l’activité de la Société Populaire. Elle assiste au premier rang de toutes les nombreuses manifestations et souvent provoquées par elle.
Dès le 8 septembre 1793, la Société Populaire avait remis à la Convention Nationale une motion, afin de changer le nom de la commune. La Convention décréta le jour même qu’elle se nommerait "Franconville la Libre". La municipalité n’avait pris aucune part à cette décision et le maire en fut avisé le 4 octobre. Il fut décrété que les citoyens devront porter la cocarde tricolore sur le coté gauche de la tête, sous peine d’être suspectés d'anti-révolutionnaires, arrêtés et emprisonnés.
Elle organise la cérémonie de la «
brûlure et cassure des portraits royaux et autres signes féodaux» qui eut lieu le 15 septembre sur la place devant l’église, auprès de l’arbre de la Liberté, où avait été établi un bûcher. Les membres de la Société Populaire étaient précédés de piques portant le bonnet de la Liberté, de drapeaux aux trois couleurs et d’autres attributs, symboles de la Liberté et de l’Égalité.
Le 23 septembre, les capitaines des quatre compagnies de fusilliers de la garde nationale, étaient venus réclamer à la municipalité le drapeau de la garde nationale, «
pour y faire effacer les signes de la féodalité royaliste et tyrannique qu’il portait pour y substituer les signes de la République française». Le drapeau, ou du moins ce qu’il en restait, fut déposé dans la maison commune. Candas alerta la société des Jacobins de Paris et le 29 septembre, une délégation parisienne arriva à Franconville. On dressa un nouveau bûcher et le drapeau fut brûlé, devant le Conseil municipal, le Conseil général, le Comité de surveillance de la commune, la Société populaire et les députés de la société jacobine, tous réunis sur la place publique.
Toutes les épitaphes, tombes, inscriptions, soit sur le sol ou autour de l’église ou dans le cimetière sont supprimées suite à l'arrêté du 7 novembre 1793. Le 11 novembre, un détachement de onze hommes et d’un officier de l’armée révolutionnaire vinrent faire la vérification de ces opérations «
qu’il ne subsista aucun vestige de féodalité et rien qui puisse blesser l’égalité».
Le 9 novembre 1793, (19 brumaire an II), la Société Populaire invita le maire et la municipalité à une cérémonie qui consistait à la plantation d’un nouvel arbre de la liberté. Ce jour là, la Société Populaire inaugurait sa nouvelle salle des séances dans la maison de Monsieur de la Crosnière. Celui-ci, bien que ne partageant pas ces idées, désirait donner une preuve de civisme qui lui servira plus tard.
Le 19 décembre, la Société Populaire revendiqua les pierres tombales enlevées au cimetière et dans l’église, afin d’élever sur la place de la Liberté un autel à la Patrie. Une fois construit il y eut une cérémonie.
Le 26 mars 1794, la Société Populaire a présenté, pour remplir les fonctions d’instituteur et d’institutrice, le citoyen Couvreur et la citoyenne Georgeret.
En vertu de la loi du 13 mars 1794 (23 ventôse an II), Candas, principal meneur dut cesser ses fonctions. La municipalité et la société populaire purent ainsi agir de concert.
Suite à la tentative d’assassinat de Robespierre le 23 mai 1794 (4 prairial an II), un courrier fut adressé à la Convention nationale exprimant sa reconnaissance à l’Être suprême, félicitant Robespierre d’avoir échappé à un attentat. Par la suite, après son assassinat, il est assez piquant de lire une seconde lettre «
Les habitants de Franconville ont vu avec horreur les attentats commis par Robespierre et ses complices. Ces traîtres sont anéantis par la justice, la Liberté veille…»

Conclusion

La Société Populaire ferma ses portes le 2 septembre 1794 (16 fructidor an II). La liquidation financière fut faite le 3 mai 1795 (14 floréal an III). La Société Populaire de Franconville était bien morte, plus de trois mois avant le décret de la Convention nationale du 23 août 1795 (6 fructidor an II).
La Société était composée en grande partie d’étrangers à la ville, avec par exemple des exaltés qui criaient «Fouettez, fouettez les aristocrates». La municipalité de Franconville avait pour maire Jean-Baptiste Guichard, homme de loi, qui ne s’en laissa pas imposer et notait
«la société populaire pervertit l’esprit public par la distribution gratuite de journaux, de soulever les citoyens contre les autorités constituées». Le péril était devenu si imminent, que les citoyens de la commune propriétaires, s’étaient présentés à l’affiliation de cette société, pour empêcher et arrêter le mal qu’elle se proposait de faire. Parmi ces nouveaux affiliés, nous trouvons le citoyen Bouju, notaire et officier municipal, ainsi que Cadet de Vaux qui n’épousaient aucune idée de cette société et qui réprouvaient et condamnaient tous les excès. Ce dernier, servit de frein à la Société Populaire, son ami Guichard, maire de Franconville lui ayant conseillé son affiliation.

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Sources : André Vaquier, la Société Populaire
Registres municipaux époque révolutionnaire.